LETTRES DE TANANARIVE

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De Claire-Lise Lombard & Faranirina Rajaonah

De Tananarive, Jean Beigbeder écrit à son père en France. Il laisse une correspondance unique, « à la croisée de l’individuel et du social». Entre 1924 et 1927, celui que ses éclaireurs ont totémisé «  Z’œil de chouette » a reçu mission de lancer sur la Grande Ile deux mouvements de jeunesse, le scoutisme et le « Foyer », une section des Unions chrétiennes de jeunes gens.

  Du Nord au Sud, les vies se croisent, animées par le rythme des saisons et les coutumes ancestrales. Dans les villages et jusqu’aux campagnes les plus reculées, l’auteur fait des rencontres inattendues et touchantes qui la marqueront et laisseront leurs empreintes sur les carnets qui l’accompagnent.

Beigbeder décrit son travail et les communautés protestantes dans une ville qui s’est approprié le christianisme. Il évoque la vie quotidienne à la capitale et la convivialité au sein de sa maisonnée, autour de sa femme, la cheftaine Odette Meyer. Il fait le récit des évènements marquants qui se déroulent dans cette ancienne cité royale où les Vazahas (Blancs) doivent prendre leurs marques, alors même que les Malgaches y subissent la discrimination. Il découvre les campagnes de l’Imerina, en compagnie de Vazahas ou de Malgaches. Ses voyages le conduisent au-delà des Hautes Terres centrales. En même temps, Beigbeder reste connecté à l’andafy (au delà des mers) : sa famille, les réseaux protestants ou encore l’actualité  politique de la métropole et des colonies.

Jean Beigbeder, alias « Rabeigy » pour les Malgaches, ne remet pas en cause la colonisation ; néanmoins, il apprend la langue malgache, respecte les pratiques coutumières et entretien des relations de fihavanana (parenté) avec quelques jeunes malgaches. Médiateur culturel, il veut donner à différentes générations d’accéder à la culture européenne et cherche à faire du « Foyer » un « espace franco-malgache ». Quant aux malgaches, ils réussissent à en faire un « espace de liberté », à un moment où la contestation anticoloniale prend de l’ampleur. Le « Foyer »contribue ainsi à les révéler non comme des simples sujets mais comme des acteurs de leur destin individuel et collectif.

Les auteures : 

Claire-Lise Lombard est responsable de la Bibliothèque du Défap-Service protestant de mission, à Paris. Elle est en particulier chargée  de la valorisation des archives de la Société des missions évangélique de Paris (1822-1971), fonds ayant bénéficié en 2005 d’une mesure de classement comme archives historiques.

Faranirina Rajaonah, spécialiste en histoire sociale et culturelle de Madagascar au XXème siècle, a été Professeure d’Université à Antananarivo puis à Paris-Diderot. Elle a dirigé ou codirigé des ouvrages sur Madagascar et le Sud-Ouest de l’Océan Indien et a participé à diverses publications. Elle est membre du Comité scientifique de l’Histoire générale de l’Afrique de l’Unesco pour des volumes à parus en 2019.         

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